Les situations d’urgence sont souvent tr�s
choquantes pour toutes les personnes concern�es et d�clenchent toute
une s�rie de sentiments qui peuvent avoir des r�percussions
consid�rables.
REACTIONS SUR LE PLAN AFFECTIF ET
PSYCHOLOGIQUE
La mani�re dont chaque parent r�agit �
une situation d’urgence d�pend :
de la situation familiale de la patiente et de ses relations
avec son partenaire ;
de la situation sociale de la patiente/du couple, de leurs
pratiques culturelles et religieuses et de leurs croyances ;
de la personnalit� des personnes impliqu�es, de la qualit� et
de la nature sociale, pratique ou affective du soutien que
ces personnes apportent � la patiente ;
de la nature, de la gravit� et du pronostic de l’affection,
de la possibilit� ou non de recourir � des services de sant� et
de la qualit� de ces services.
Parmi les r�actions fr�quentes
� une urgence obst�tricale ou � un d�c�s, on observe :
-
un
d�ni de la r�alit� (� ce n’est pas vrai �) ;
un sentiment de culpabilit� tenant � une responsabilit�
�ventuelle ;
de la col�re (fr�quemment dirig�e contre
le personnel soignant mais qui masque souvent une col�re que les
parents �prouvent vis-�-vis d’eux-m�mes pour avoir
� �chou� �) ;
l’envie de marchander (en
particulier si la patiente oscille entre la vie et la mort) ;
de la d�pression et une perte d’amour-propre qui peut se prolonger
;
un sentiment d’isolement (l’impression d’�tre diff�rent
des autres, d’�tre � part) qui peut �tre renforc� par le fait
que les soignants �vitent parfois les personnes qui ont perdu un
proche ;
une d�sorientation.
PRINCIPES GENERAUX A OBSERVER EN MATIERE DE COMMUNICATION ET DE
SOUTIEN
Bien que chaque urgence constitue un cas
particulier, les principes ci-apr�s donnent une orientation
g�n�rale sur la conduite � tenir. La communication et la compassion
sont probablement les principaux �l�ments d’une prise en charge
efficace dans ce genre de situations.
Sur le moment
-
Ecouter les personnes qui traversent une situation p�nible. La
patiente et la famille ont besoin d’ext�rioriser leur douleur,
leur chagrin.
-
Ne pas changer de sujet au profit de questions plus faciles ou
moins douloureuses � aborder. Faire preuve de compassion.
-
Donner le plus d’informations possibles � la patiente et �
sa famille sur la situation. S’ils comprennent ce qui se passe
et ce qu’on fait pour y rem�dier, ils seront moins inquiets et
mieux pr�par�s � la suite des �v�nements.
-
Etre honn�te. Ne pas h�siter � reconna�tre ce qu’on
ignore. Il est plus important d’entretenir un climat de
confiance que d’avoir l’air �rudit.
-
Si la langue constitue une barri�re, se faire aider par un
interpr�te.
-
Ne pas d�l�guer le cas au personnel infirmier ou
� des internes.
-
Veiller � ce qu’une personne de son choix accompagne la
patiente et, si possible, � ce que le m�me soignant la suive
tout au long du travail et de l’accouchement. L’accompagnement
peut permettre � une patiente de surmonter sa peur et sa douleur
et de se sentir, en outre, moins seule et moins d�sempar�e.
-
Si possible, encourager l’accompagnant � participer
activement aux soins. L’installer � la t�te du lit pour qu’il
puisse se concentrer sur les besoins affectifs de la patiente.
-
Offrir la plus grande intimit� possible � la patiente et �
sa famille pendant et apr�s les faits.
Par la suite
-
Apporter une aide pratique, des informations et un soutien
affectif.
-
Faire preuve de respect � l’�gard des croyances et coutumes
locales et s’adapter autant que possible aux besoins de la
famille.
-
Apporter un soutien et un conseil � la patiente et � sa
famille et leur permettre de r�fl�chir aux �v�nements qui se
sont d�roul�s.
-
Leur expliquer ce qui s’est pass� pour apaiser leurs
angoisses et leur sentiment de culpabilit�. Un grand nombre de
femmes ou de familles se sentent responsables de ce qui est
arriv�.
-
Ecouter la patiente exprimer ce qu’elle ressent, lui montrer
qu’elle est comprise sans �tre jug�e. Parfois, la
communication non verbale en dit plus que les mots : une
simple pression de la main ou un regard t�moignant d’un r�el
int�r�t peuvent �tre riches de sens.
-
R�p�ter l’information plusieurs fois et donner si possible
des informations �crites. Les personnes confront�es � une
urgence retiennent difficilement ce qu’on leur dit.
-
Les prestataires de soins peuvent ressentir de la col�re, de
la culpabilit�, du chagrin, de la douleur et de la frustration
face aux urgences obst�tricales, ce qui peut les amener �
�viter la patiente/la famille. Ce n’est pas une preuve de
faiblesse que de laisser transpara�tre ses �motions.
-
Penser � prendre soin du personnel qui peut lui aussi
�prouver des sentiments de culpabilit�, de chagrin, de confusion
ou autres.
MORTALITE ET MORBIDITE MATERNELLES
MORTALITE MATERNELLE
Le
d�c�s d’une femme en couches ou suite � des complications de la
grossesse constitue une exp�rience d�vastatrice pour la famille et
les enfants de cette femme si elle en avait. Ainsi, outre les
principes �num�r�s ci-dessus, il convient de ne pas oublier ce qui
suit :
Sur le moment
-
Apporter un soutien psychologique � la patiente tant qu’elle
est �veill�e ou m�me vaguement consciente de ce qui lui arrive
ou risque de lui arriver.
-
Si la mort est in�vitable, offrir un r�confort affectif et
spirituel � la patiente plut�t que de s’acharner � lui
dispenser les soins d’urgence (ce qui serait vain � ce stade).
-
Pr�server sa dignit� et la traiter avec respect � tous
moments, m�me si elle est inconsciente ou d�j�
d�c�d�e.
Par la suite
-
Autoriser le conjoint ou le partenaire et la famille � rester
aupr�s d’elle.
-
Si possible, aider la famille � prendre les dispositions
n�cessaires pour les fun�railles et s’assurer que tous les
documents n�cessaires lui ont bien �t� remis.
-
Expliquer aux proches ce qui s’est pass� et r�pondre �
toutes leurs questions. Leur donner la possibilit� de revenir
pour poser des questions suppl�mentaires.
MORBIDITE MATERNELLE SEVERE
L’accouchement laisse parfois des s�quelles physiques ou
psychologiques graves.
Sur le moment
Si possible, faire participer la patiente et la famille au
d�roulement de l’accouchement, en particulier si cela r�pond �
une habitude culturelle.
Veiller, si possible, � ce qu’un membre du personnel entoure la
patiente et son partenaire tant sur le plan affectif qu’en mati�re
d’information.
Par la suite
-
Expliquer clairement � la patiente et aux personnes qui l’accompagnent
en quoi consistent l’affection et le traitement afin qu’elles
comprennent bien.
-
Prendre les mesures n�cessaires pour le traitement et/ou le
transfert, si besoin est.
-
Programmer une visite de suivi pour contr�ler l’�volution
et envisager les solutions possibles.
MORTALITE ET MORBIDITE NEONATALES
Si les principes g�n�raux du soutien affectif aux femmes
confront�es � une urgence obst�tricale restent valables lorsqu’un
enfant meurt ou na�t avec une malformation, il convient de prendre en
consid�ration des �l�ments particuliers.
Mort in utero ou per partum
Un certain nombre d’�l�ments influeront sur la r�action de
la m�re � la mort de son enfant. Il s’agit des �l�ments
indiqu�s plus haut ainsi que :
-
des ant�c�dents de la m�re sur le plan g�n�ral et sur le
plan obst�trical ;
-
de la mesure dans laquelle l’enfant �tait
� d�sir� � ;
-
des �v�nements qui ont entour� la naissance et de la cause
de la perte du b�b� ;
-
des exp�riences pr�c�dentes que la m�re peut avoir eu de la
mort.
Sur le moment
-
Eviter de recourir � la s�dation pour aider la patiente �
faire face, car cela risquerait de retarder l’acceptation de la
mort et, en faisant revivre cette exp�rience plus tard � la
m�re, de la rendre plus difficile car cette �tape fait partie du
processus de gu�rison affective.
-
Autoriser les parents � assister aux efforts du personnel
soignant pour essayer de ranimer leur enfant.
-
Encourager la m�re ou, le cas �ch�ant, les deux parents, �
voir et � prendre le b�b� dans leurs bras pour faciliter leur
deuil.
-
Pr�parer les parents � l’�ventualit� que le b�b� ait
une apparence d�rangeante ou inattendue (peau rouge, frip�e et
d�coll�e). Si n�cessaire, envelopper le b�b� de mani�re �
ce qu’il ait l’air aussi normal que possible � premi�re vue.
-
Eviter de s�parer la m�re de son enfant trop t�t (avant qu’elle
n’ait manifest� qu’elle �tait pr�te), car cela peut
perturber le processus de deuil et le ralentir.
Par la suite
-
Autoriser la patiente/la famille � continuer � passer du
temps aupr�s du b�b�. Les parents d’un enfant mort-n� ont
besoin de faire connaissance avec celui-ci.
-
Tout le monde ne fait pas son deuil de la m�me mani�re, mais
pour beaucoup, le souvenir est important. Remettre � la patiente
ou � sa famille des souvenirs tels qu’une m�che de cheveux, l’�tiquette
du berceau ou une �tiquette portant le nom du b�b�.
-
L� o� la coutume veut que l’on donne un pr�nom aux enfants
� leur naissance, encourager la patiente/la famille � donner au
b�b� le nom qui avait �t� choisi.
-
Autoriser la patiente/la famille � pr�parer le b�b� pour
ses fun�railles si tel est leur souhait.
-
Encourager les pratiques fun�raires conformes aux coutumes
locales et veiller � ce que les proc�dures m�dicales (comme les
autopsies) ne constituent pas un obstacle � ces pratiques.
-
Mettre sur pied une rencontre avec la patiente et son
partenaire pour parler de ce qui s’est pass� et discuter, le
cas �ch�ant, de mesures pr�ventives pour le futur.
OPERATIONS DESTRUCTRICES
La craniotomie et les autres op�rations de destruction du fœtus
mort peuvent �tre p�nibles et demander des soins psychologiques
suppl�mentaires.
Sur le moment
-
Il est fondamental d’expliquer � la patiente et � sa
famille que le b�b� est mort et que la priorit� est de sauver
la m�re.
-
Encourager le partenaire � offrir du soutien et du r�confort
� la m�re jusqu’� ce qu’elle soit sous anesth�sie ou
s�datif.
-
Si la m�re est �veill�e, ne serait ce que partiellement,
durant l’intervention, la prot�ger de la vue de l’intervention
et du b�b�.
-
Apr�s l’intervention, pr�parer le b�b� de mani�re � ce
que la m�re/la famille puissent le voir et/ou le prendre dans
leurs bras si elles le souhaitent, en particulier si la famille
doit pr�parer le b�b� pour les fun�railles.
Par la suite
-
Octroyer un temps de visite illimit� � l’accompagnant.
-
Conseiller et informer la patiente et son accompagnant et leur
expliquer qu’il n’y avait pas d’autre solution.
-
Mettre sur pied une visite de suivi qui aura lieu plusieurs
semaines plus tard pour r�pondre aux questions �ventuelles de la
patiente et la pr�parer � une nouvelle grossesse (ou au fait qu’une
nouvelle grossesse est impossible/d�conseill�e).
-
Offrir, si besoin est, des services de planification familiale
(tableau
S-3).
NAISSANCE D’UN ENFANT AYANT UNE MALFORMATION
La naissance d’un enfant avec une malformation constitue une
exp�rience traumatisante pour les parents et la famille. Les
r�actions sont variables.
-
Autoriser la m�re � voir son enfant et � le prendre dans ses
bras. Certaines femmes acceptent leur enfant imm�diatement alors
que pour d’autres, cela peut prendre plus de temps.
-
L’incr�dulit�, le refus de la r�alit� et la tristesse
sont des r�actions normales, en particulier si la malformation n’avait
pas �t� d�cel�e avant l’accouchement. Les sentiments d’injustice,
de d�sespoir, de d�pression, d’angoisse, de col�re, d’�chec
et d’appr�hension sont fr�quents.
Sur le moment
-
Donner l’enfant � ses parents d�s l’accouchement. Le fait
de leur permettre de d�couvrir la malformation imm�diatement
peut aider � la rendre moins traumatisante.
-
Dans les cas de difformit� grave, envelopper l’enfant avant
de le mettre dans les bras de la m�re de fa�on � ce qu’elle
voie d’abord ce qu’il a de normal. Ne pas obliger la m�re �
examiner la malformation.
-
Pr�parer un lit ou m�me un simple lit de camp afin que l’accompagnant
puisse rester aupr�s de la m�re si celle-ci le souhaite.
Par la suite
-
Discuter de l’enfant et de son probl�me avec la patiente et
la famille, si possible, ensemble.
-
Laisser la m�re et son partenaire rendre visite librement �
leur enfant. Toujours laisser l’enfant avec sa m�re. Plus la
m�re et son partenaire peuvent s’occuper eux-m�mes de l’enfant,
plus vite ils l’accepteront.
-
Veiller � ce qu’ils puissent prendre contact avec des
professionnels et des groupes de soutien.
MORBIDITE PSYCHOLOGIQUE
La d�tresse affective du post-partum est tr�s fr�quente. Elle
peut aller du simple blues du post-partum (qui touche environ 80% des
femmes) � la d�pression voire � la psychose du post-partum. La
psychose du post-partum peut repr�senter une menace pour la vie de la
m�re ou de l’enfant.
DEPRESSION DU POST-PARTUM
La d�pression du post-partum touche jusqu’� 34% des femmes
apr�s un accouchement. Elle d�bute g�n�ralement au cours des
premi�res semaines ou premiers mois des suites de couches et peut
durer un an et plus. L’�tat d�pressif ne fait pas forc�ment
partie des sympt�mes pr�dominants bien qu’il soit le plus souvent
�vident. D’autres sympt�mes tels que l’�puisement, l’irritabilit�,
la propension � pleurer, la baisse de l’�nergie et de la
motivation, les sentiments d’impuissance et de d�sespoir, la
disparition de la libido et de l’app�tit et les troubles du sommeil
sont pr�sents. La femme peut d�clarer souffrir de c�phal�es, d’asthme,
de douleurs dorsales, de leucorrh�es et de douleurs abdominales. Elle
peut �galement pr�senter d’autres sympt�mes comme les pens�es
obsessionnelles, la peur de faire du mal au b�b� ou de se faire du
mal � elle-m�me, les id�es suicidaires et la
d�personnalisation.
Le pronostic de la d�pression du post-partum est bon si elle est
diagnostiqu�e et trait�e suffisamment t�t. Dans plus de deux tiers
des cas, la patiente gu�rit dans l’ann�e. La pr�sence d’un
accompagnant pendant le travail peut permettre d’�viter la
d�pression du post-partum.
Une fois �tablie, la d�pression du post-partum requiert un
conseil psychologique et un soutien pratique. En r�gle g�n�rale :
-
apporter � la patiente un soutien psychologique et une aide
sur le plan pratique (prise en charge du b�b� et soins �
domicile) ;
-
l’�couter et lui offrir soutien et encouragement ;
-
l’assurer qu’il s’agit d’un ph�nom�ne assez fr�quent
et que beaucoup de femmes souffrent de la m�me chose ;
-
l’aider � modifier sa perception de la maternit� et aider
le couple � consid�rer tous les d�tails de leurs r�les
respectifs de nouveaux parents - il se peut qu’ils aient
besoin de revoir leurs attentes et d’adapter leurs activit�s ;
-
si elle souffre de d�pression grave, envisager de lui
administrer des antid�presseurs si l’�tablissement en
dispose et garder � l’esprit que les m�dicaments peuvent
passer dans le lait maternel de sorte qu’il convient alors de
reconsid�rer la question de l’allaitement.
Les soins peuvent �tre dispens�s � domicile ou dans des
dispensaires de jour. Les groupes locaux de soutien constitu�s de
femmes ayant v�cu le m�me genre d’exp�rience sont des plus
utiles.
PSYCHOSE DU POST-PARTUM
La psychose du post-partum commence g�n�ralement au moment de l’accouchement
et touche moins de 1% des parturientes. La cause en est inconnue, bien
qu’environ la moiti� des femmes atteintes de psychose du
post-partum aient des ant�c�dents de maladie mentale. La psychose du
post-partum est caract�ris�e par l’apparition brutale d’hallucinations,
d’insomnie, d’une obsession du b�b�, d’un �tat d�pressif
grave, d’angoisse, de d�sespoir et de pulsions suicidaires ou
infanticides.
La m�re peut parfois continuer � s’occuper de son enfant
normalement. Le pronostic de gu�rison est excellent mais environ 50 %
des femmes font une rechute lors des accouchements suivants. En r�gle
g�n�rale :
-
apporter � la patiente un soutien psychologique et une aide
sur le plan pratique (prise en charge du b�b� et soins �
domicile) ;
-
l’�couter et lui offrir soutien et encouragement - c’est
important si l’on veut pouvoir �viter les issues tragiques ;
-
l’aider � �tre moins angoiss�e ;
-
�viter d’aborder des questions d’ordre affectif lorsqu’elle
est instable;
-
si elle prend des psychotropes, garder � l’esprit que les
m�dicaments peuvent passer dans le lait maternel et qu’il
convient alors de reconsid�rer la question de l’allaitement.
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